I
Même s’il était un peu brouillon, mon père aimait
les dates exactes.
Il est mort le 1er janvier 1995.
C’est
le premier cadavre que j’ai vu et touché.
Il m’a fallu
attendre 55 ans pour faire cette expérience dans une
petite morgue de la région...
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I
Même s’il était un peu brouillon, mon père aimait
les dates exactes.
Il est mort le 1er janvier 1995.
C’est
le premier cadavre que j’ai vu et touché.
Il m’a fallu
attendre 55 ans pour faire cette expérience dans une
petite morgue de la région parisienne.
On m’a demandé
si je voulais le voir une dernière fois, avant qu’on ne le
mette en bière.
« Non! » a crié derrière moi l’un de mes
frères sur un ton terrifié.
C’est ce ton terrifié qui m’a
poussé à le contredire en répondant « Oui ».
Je l’aurais
fait de toute façon, là je n’ai pas hésité.
Je n’admettais
pas que l’on soit épouvanté devant la mort.
Je me lançais
aussi un défi, car j’ignorais quelles seraient mes réactions
devant le cadavre de mon père.
Derrière la porte en fer, on a poussé un chariot, puis
on m’a fait entrer.
Couché sur le dos, mon père était pâle,
son front dégarni auréolé de cheveux gris, ses sourcils
broussailleux sur des yeux fermés sans lunettes.
Je me suis
penché et je l’ai embrassé.
Le contact avec
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