Je regardais le rocher du Trenze. Enfin, regarder c'est un bien grand mot. On va dire plutôt visualiser. Car le rocher du Trenze n'a pas poussé n'importe où. Il est apparu dans un coin perdu des Cévennes. Les Cévennes les vraies, attention, pas un de ces...
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Je regardais le rocher du Trenze. Enfin, regarder c'est un bien grand mot. On va dire plutôt visualiser. Car le rocher du Trenze n'a pas poussé n'importe où. Il est apparu dans un coin perdu des Cévennes. Les Cévennes les vraies, attention, pas un de ces blocs de béton dégueulasse auquel on donne des noms bien fleuris, comme si ça allait verboiser le quartier. Non, les Cévennes c'est un vieux massif dépeuplé avec une moyenne d'âge au dessus du voltage d'un Ricard sec. Et si je regardais ce rocher, c'est parce que, voyez-vous, il n'a jamais changé. Pas pris une ride le vieux bougre. Il s'est fait enneiger, semi-couler par les rivières du ciel (on appelle ça des « orages Cévenols »), tacheter l'été par les quelques zones de genêts, scotchées comme la mousse sur les vieilles barques ; bref le temps passe et le rocher reste. Et moi je regardais ce rocher au fond de ma tête et ça me faisait du bien. Car ici tout change très vite, on a pas le temps de mettre une chemise que la voilà dépassée
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